Grande, très grande, beaucoup trop grande. Impossible de ne pas la repérer à une centaine de mètres, même dans un couloir bondé d'Edenbridge. Elle est trop visible, trop blingee, trop kitschou, tout ce que vous voudrez pour qualifier ses préférences vestimentaires. Elle avoisine le mètre 80, talons compris. Les talons compensés et les plateforms sont comptés avec parce qu'elle ne s'en sépare jamais, un peu comme des extensions de son propre corps. Elle n'a pas la carrure d'une joueuse de basket, mais conserve tout de même ce je-ne-sais quoi d'intriguant, un peu effrayant, qui fait dire à plus d'un qu'elle ne doit pas avoir un revers de fillette.

Plus en détail, Masha a les yeux bleus. Bleus aciers et inflexibles. Sa peau est relativement pâle et surtout très douce. Elle est de celles qui tournent davantage au rouge écrevisse qu'au doré mâtiné à la moindre exposition. Elle remédie à ce détail à coup de crème auto-bronzante quand arrive l'été. Son amour pour la couleur rose l'a conduite à teindre une bonne partie de sa tignasse de blondasse psychopasta.

Autre : Elle arbore une tache de naissance imposante entre les omoplates et toute une série de petits tatouages très équivoques sous la plante des pieds et à l’intérieur de la cuisse qu’elle se garde bien de montrer à qui que ce soit. Des petits secrets Masha ?

Difficile de faire chavirer l'indestructible Masha Rookwood. Colosse au pied d'argile, ses faiblesses sont éclipsées par ses éternels sourires. Très avenante, elle n'aura aucune hésitation à engager la discussion avec un parfait inconnu... à condition que celui-ci ne demande pas à en savoir davantage sur elle que ce qu'elle veut bien dire. Sa plus grande force réside sans doute dans son enthousiasme indéfectible, qu'elle aime à arguer dans ses faits et gestes quoiqu'il arrive. Une manière bien à elle de se donner du courage. Masha, à la manière d'un équilibriste, fait appel à toute son habileté pour tromper la fatalité. Dotée d'un fort caractère, elle ne veut laisser rien ni personne - pas même son corps - prendre le dessus. Elle est son propre maître, et si elle peine parfois à garder le contrôle, elle n'en montre rien. C'est un personnage qui n'aime pas se sentir en infériorité et qui a en horreur la notion de destin. Bien qu'elle ne soit pas aussi forte qu'elle en ai l'air, elle maintiendra toujours le même cap, sans en changer, même s'il est évident qu'elle se trompe, car selon elle, la seule finalité est celle que l'on choisie.

Sous l'armure, se cache une personne plus instable, peinant à encaisser les coups du sort. Tout juste armée de sa volonté, il ne suffit parfois pas d'un simple trait de caractère pour contrer les épreuves de la vie. Aussi peut il lui arriver de se laisser aller à fumer ou à boire le courage au goulot .

« Le don n’a pas été, n’est pas, et ne sera pas maîtrisé. Le temps ne fera pas de halte dans sa course effrénée pour m’accorder cette chance. Oui, je crois qu’il n’y a pas de recherche plus profonde à effectuer. C’est triste à dire, mais il faut se contenter de ce qu’on a. Se contenter ? Se contenter.

Se contenter ?! Je ne me contente pas ! Non, je ne suis pas de ceux qui se contentent ! J’outrepasserai les limites, les règles les plus fondamentales s’il le faut, mais jamais je ne me contenterai. Que les paillettes ne veuille pas faire de moi ce à quoi j’aspire, soit. Que les très respectables paternels estiment que ceci n’est qu’une affabulation d’adolescente, soit. Je m’octroierai ces choses qui me sont refusées, car elles me reviennent de plein droit. Se contenter est le premier pas vers la servilité. Je suis libre. Et je le resterai.

[...]

Je suis née il y a longtemps. De l’autre côté de l’océan. Rien ne me rendra l’enfance douce et chaleureuse que j’ai eu jadis. Une enfance où le don n’était qu’un détail. Nous étions tous formidables, sans distinction ni exception. Les trois têtes blondes des Rookwood. Oui, c’est ainsi que j’ai entendu appeler.

Demain, un nouveau soleil se lèvera. Oui, la vie est faite de changements, et de gens, plus ou moins rapides pour s’y adapter. Pour ma part, je crois que je suis une lente. Mon objectif est restée la même que celle des idoles de mon enfance : devenir grand, être sue, vue, connue, admirée de tous. Le temps passe et je ne grandi pas. La vie est-elle réellement faite de changements ? Peut-être ai-je changé. Peut-être pas. Il a bien fallu admettre que parler, pontifier et théoriser tout ce qu’on rencontrions ne servait pas à expliquer le tout. Le tout, c’est cette chose, cette chose que l’on sent sans voir pour autant. Cette chose qui fait l’essence même de nos vies et de la nature à la fois. Une curieuse chose qui coule dans nos veines et dans nos gorges.

Demain, un nouveau soleil se lèvera, et je partirai. Je partirai parce que je sais qu’ailleurs, une autre Masha m’attend. Je partirai parce qu’ici je ne suis pas à grand-chose. J’irais où les gens ne pourront voir. A ma manière, moi aussi, je préserverai la liberté du changement. Je suis ce que je veux être et non pas ce que je suis. »